Janvier 2002, Loi de Modernisation Sociale sur la Prévention des Risques Psychosociaux indique : « L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ». (Code du Travail)
C’est en 2006 que j’effectue ma première mission sur le sujet.
Une journée de sensibilisation au cours de laquelle, face à des Managers d’une grande entreprise française nous allons réfléchir à :
-->Comment adapter les textes officiels à leur pratique managériale au quotidien ?
Quelle ne fut pas leur surprise lorsqu’ils réalisent que, si les textes en vigueur étaient appliqués à la lettre, ils se seraient retrouvés face à un juge !
Ainsi, ils prenaient toute la mesure de leur responsabilité et des risques qu’ils prenaient… par méconnaissance, par ignorance… ?
Alors comment « traiter » la Méconnaissance face à : Nul n’est censé ignorer la loi ?
Autrement dit, comment aider mon client à prendre conscience que son style de management et sa communication vis-à-vis de son collaborateur/trice sont apparentés à des dérives managériales qui, si elles se poursuivent sur un certain temps, peuvent être reconnues comme harcèlement moral ?
C’est justement en m’appuyant sur les textes et leurs conséquences en cas de non respect de ceux-ci que je parviens à faire avancer mon client vers la prise de conscience de ses actes.
Dans cette formation, je vous montre le type d’exercices que j’utilise à ces fins.
Voici un exemple concret
Un collaborateur porte plainte pour harcèlement moral par son manager.
Pour éviter des ennuis avec la justice, l’entreprise entame une procédure de licenciement touchant ce manager. Elle pense qu’avec cette sanction, elle s’épargne d’autres problèmes et protège son collaborateur.
Elle reconnait qu’il y a un problème.
Que le problème est suffisamment important pour entamer une procédure de licenciement
Il y a donc des solutions.
Méconnaissance ! Elle n’envisage pas de possibilité de changement chez ce manager.
A cet instant, l’entreprise s’agite et méconnait son degré de responsabilité.
En effet, si le juge reconnait qu’il y a eu harcèlement, le manager risque bien d’être condamné… l’entreprise également car le licenciement du manager n’exclut pas la responsabilité de l’entreprise même si le collaborateur indélicat ne fait plus partie de l’entreprise au moment du jugement. Souvent l’entreprise ne dispose pas de ces informations au moment où elle traverse cette turbulence.
Notre mission est donc, sans être des spécialistes juridiques, de mettre l’accent sur tous ces aspects pour protéger les collaborateurs de tous niveaux et par là même l’entreprise et sa Direction.
Aujourd’hui, une partie de mon activité de consultante est consacrée à des interventions sur le sujet sous forme d’ateliers, de conférence, de formation :
- Sensibilisation à la Prévention des RPS
- Gestion du stress au travail
- Gestion des tensions au travail
- Préserver son capital santé en milieu professionnel
- Concilier vie personnelle et vie professionnelle
…
Pour prévenir les risques psychosociaux, l’entreprise fait appel à des cabinets de consultants qui se sont spécialisés dans la formation et l’accompagnement des managers pour leur permettre d’anticiper les « facteurs de risques » et mettre en place les « facteurs de protection » à l’aide d’indicateurs que nous leur soumettons et qui font l’objet d’ajustements pour mieux répondre à leurs besoins, leur structure, leur organisation.
Cette question est encore aujourd’hui très délicate.
En effet, l’entreprise est confrontée à de multiples mutations que certains n’hésitent pas à qualifier de permanentes. Ce qui va générer beaucoup de comportements passifs chez les salariés.
Sur quoi portent les mutations ?
Les mutations auxquelles sont confrontées les entreprises sont de divers ordres :
- L’évolution des besoins des clients : qualité, innovation…
- Les évolutions règlementaires : exigences des processus industriels
- Les évolutions technologiques : courses à la rentabilité
- Les évolutions démographiques :
o vieillissement de la population active conduisant à des départs massifs à la retraite de salariés détenteurs de compétences clés
o allongement de la vie active
- Les évolutions organisationnelles : recherche de la performance à un très haut niveau pour se maintenir sur le marché : Augmentation de la Qualité et diminution des Coûts et des Délais
- Les évolutions sociales : les générations Y et Z
- L’inter culturalité
- Le rapport au temps
- …
Quelles en sont aujourd’hui les conséquences ?
Toutes ces mutations confrontent l’entreprise à des actions ininterrompues touchant :
- L’organisation,
- Le contenu du travail
- L’écart entre le travail prescrit et le travail réel
- Les compétences attendues des salariés
- Les relations manager/subordonné
- …
Paradoxalement, une entreprise saine et viable est une entreprise qui se remet en question, ne méconnait pas les besoins et attentes de ses clients, s’adapte à son environnement, anticipe les départs en retraite pour effectuer au mieux le transfert de compétences, prend soin de tout son personnel….
Dans le cas contraire, elle se met en danger et peut très vite disparaitre.
Méconnaitre ou reconnaitre la souffrance au travail ?
Certaines grandes entreprises comme des moyennes, disent mettre en place une démarche de prévention des Risques Psychosociaux et qui, pour se dédouaner et appliquer la Loi et dire : « on a fait quelque chose » et ne plus se sentir responsables, utilisent la formation des collaborateurs comme moyen stratégique de contournement et ainsi méconnaitre ou fuir leurs responsabilités.
Il n’y a pas de véritable prise en compte de la souffrance des collaborateurs qui vont s’entendre dire « vous avez suivi une formation à la gestion du stress, donc vous êtes maintenant moins stressé ! ».
Ah ! Si ça pouvait être aussi simple à mettre en œuvre ! Si ça pouvait être aussi rapide à mettre en application. Si la formation était la seule solution !
Il est vrai que si je m’appuie sur ce que le Docteur Hans SELYE[1] dit : « Ce qui est important ce n’est pas ce qui nous arrive, mais la manière dont on le prend », alors oui chacun de nous dispose de moyens pour gérer toute situation stressante.
Ce qui me préoccupe aujourd’hui concerne les décisions stratégiques que prennent les entreprises et sur lesquelles les collaborateurs n’ont pas de prise. Autrement dit, ils ne sont pas acteurs mais spectateurs de prises de position qui peuvent avoir des conséquences sur l’organisation de leur travail, voire sur leur poste et l’existence même de leur fonction au sein de l’entreprise.
C’est là que je mesure la limite de la définition du stress de Hans SELYE.
Les mutations, les changements sont et resteront pour certains des challenges à relever, pour d’autres de véritables drames qui peuvent les mener au suicide comme nous avons pu le voir dans une grande entreprise telle qu’Orange.
Accompagner l’entreprise dans son projet de changement
Lorsqu’ils font appel à nous, les premiers échanges que nous avons avec le DHR ou le Responsable de Formation nous amène à faire un constat : le flou qui règne parfois sur la stratégie et les valeurs de l'entreprise, et qui contribue à désolidariser cet ensemble.
Bien entendu, là encore il n’y a pas de volonté à « mal faire, ou de faire mal ». Les éléments identifiés par les différents acteurs : Direction, IRP, personnel, ne sont pas rassemblés pour donner une image globale et claire de situations de souffrance.
Chacun pensant détenir « une information sans grande importance, sans conséquence » !
Plus spécifiquement, pour ce qui concerne la question psychosociale, il y a un, dans certaines entreprises, un manque de prise de conscience sur ce sujet malgré les réalités auxquelles elles sont confrontées, ce qui renforce le déni, par peur plus que par manque de considération vis-à-vis des collaborateurs :
- La peur de « voir » la souffrance de l’autre
- La peur de se sentir envahi par les émotions de l’autre et de ne pas savoir l’accueillir, la gérer
- La crainte de se sentir obligé d’en parler au risque que cela soit associé à de la délation ou à l’inverse d’être accusé de « non assistance à personne en danger »
- La peur d’entendre l’autre et de devoir mener une action, telle que « le droit de retrait » génère de l’agitation chez certains.
- La peur liée au manque de connaissance du sujet et de ses propres aptitudes à résoudre le problème
Sont autant de facteurs qui s’ajoutent à la peur d’entreprendre des actions correctives ou réparatrices et génèrent stress, fatigue et tensions au travail.
Quelles sont aujourd’hui les nouvelles perspectives ?
Nous pouvons espérer aujourd’hui qu’avec les nouvelles dispositions[2] concernant « la formation professionnelle tout au long de la vie », les entreprises qui n’ont pas encore :
- pris la mesure de ces dispositions
- mis en place les actions de préventions primaires et/ou secondaires
- pris la mesure des dégâts qui pourraient être occasionnés par une intervention de niveau tertiaire
vont mieux prendre en considération le fait qu’elles jouent un rôle essentiel pour la sécurité et la santé de leurs salariés.
En levant cette méconnaissance elle contribue à la santé même de l’entreprise.
Il nous revient donc à nous consultants, formateurs, de rassurer, d’expliquer et d’accompagner avec empathie et neutralité.
La préservation de l’image de l’entreprise
Il est vrai qu’une entreprise qui a été malmenée par des situations de RPS voit son image écornée :
- A l’intérieur par une démobilisation des salariés dont la productivité va s’en ressentir par des comportements passifs
- A l’extérieur par la perte de contrats et/ou de clients pouvant entraîner plus encore de difficultés au sein même de l’entreprise.
Attentives à préserver cette indispensable image à leur survie, certaines entreprises nous sollicitent :
1. Soit pour répondre davantage à une obligation légale qu’à une volonté de prendre soin des collaborateurs, non pas qu’elles ne le veuillent pas, mais plutôt parce qu’elles sont persuadées que « les collaborateurs sont heureux de travailler chez nous ! ».
Elles méconnaissent/ignorent qu’il y a des collaborateurs qui souffrent.
Exemple : A l’ occasion d’une formation à la gestion du stress, une participante va manifester un très haut niveau d’agitation dès le démarrage de ladite formation au point que j’ai dû faire intervenir la DRH pour qu’elle soit prise en charge. Elle risquait de compromettre le bon déroulement de la formation et de transmettre cette agitation aux autres membres du groupe.
A des problèmes personnels s’est ajouté un problème professionnel : l’entreprise a été rachetée depuis 3 semaines ! Cette information circule parmi le personnel mais aucune information officielle ne vient confirmer ou démentir.
Le démarrage de la formation devient l’endroit où se produit le coup de théâtre (selon la formule du Jeu de Berne).
2. Soit pour « faire passer un message fort en direction de personnes concernées par des situations de RPS
Exemple : Une Grande Ecole me sollicite pour mettre en place une journée de sensibilisation à la Prévention des RPS auprès de son CODIR.
Consigne de la DRH : « Je veux que vous leur fassiez peur. Un membre de notre Codir est accusé de harcèlement moral mais elle considère qu’il n’y a pas de harcèlement et nie tout en bloc. Cette affaire est au tribunal ».
Que peut-on dire dans ces deux situations ?
Dans les deux cas, nous sommes face à des comportements passifs, auxquels s’ajoutent :
Cas 1
Méconnaissance du problème. Ce qui nécessiterait de faire un diagnostic de la situation, mais ce n’est pas mon contrat avec ce client.
Cas 2
La DRH reconnait :
- Qu’il y a un problème
- Qu’il est important
- Il n’y a rien à faire en interne
En me demandant de « leur faire peur » elle m’invite dans une relation symbiotique malsaine et de prise en charge d’un niveau de problème interne à l’entreprise qui se sent démunie.
Ce n’est pas mon rôle, ce n’est pas un contrat acceptable.
Il relève plutôt du contrat psychologique et pourrait m’entrainer dans le Triangle Dramatique de Stephen Karpman.
Pourquoi aujourd’hui l’entreprise met-elle les managers au cœur du dispositif des RPS ?
L’ANACT[3] qui effectue régulièrement des enquêtes, souligne trois raisons qui mettent les managers au cœur des dispositifs de prévention des risques psychosociaux :
Une cible privilégiée du stress : les managers gèrent des injonctions contradictoires sans pour autant avoir les marges de manœuvres nécessaires pour y faire face.
Des détecteurs des signaux : compte tenu de leur position et de leur connaissance du travail, ils sont plus à même de détecter les premiers signaux de détresse des collaborateurs ainsi que d’autres facteurs de RPS comme la variation de la charge de travail, l’affectation de moyens limités, un raccourcissement des délais…
Des régulateurs de tensions : par ses actions de soutien, de reconnaissance et de régulation de l’activité au quotidien, il est l’acteur central pour gérer les tensions liées au travail et favoriser les facteurs de protection.
Quelle est la perception du rôle du manager dans le cadre de référence du collaborateur ?
Les salariés attendent donc beaucoup de leur manager :
- Une bonne écoute
- De la disponibilité
- De la reconnaissance
- Une bonne aptitude à planifier et organiser l’équipe et le travail
- Un soutien inconditionnel
Ce manager est lui-même un collaborateur vis-à-vis de son propre manager.
Donc s’il vient à manquer de disponibilité, de reconnaissance ou d’objectivité dans une situation donnée, ses compétences managériales sont remises en cause et vont bousculer le cadre de référence du collaborateur.
Alors, quelle est la place du Cadre de Référence dans ce type de situations ?
Selon les SCHIFF, le cadre de référence se définit comme :
- Un Mécanisme par lequel une personne filtre et oriente sa vision de la réalité de façon à fuir sa responsabilité, à éviter d’avoir à agir, à rester dans des relations problématiques conflictuelles et dépendantes POUR MAINTENIR SON CADRE DE REFERENCE.
- Le cadre de référence d’un individu est la structure des réponses (connexions nerveuses) associées (conditionnées), qui intègre les différents états du moi en réponse à des stimuli spécifiques.
- Il fournit à l’individu un ensemble cohérent de perceptions, de concepts, d’émotions et d’actions, qui lui sert à définir lui-même, les autres et le monde.
Pour réussir son projet, l’entreprise met les managers de tous niveaux au cœur du dispositif de la prévention des RPS et crée des indicateurs de dépistage collectifs qui seront validés en amont :
- Indicateurs de dépistage liés au fonctionnement de l’entreprise
- Indicateurs de dépistage liés à la santé et à la sécurité
- Indicateurs internes : climat social
Ces indicateurs constitueront un cadre de référence commun à tous les collaborateurs et permettront d’asseoir toutes les autres actions que l’entreprise devra mettre en œuvre pour assurer sa compétitivité.
En conclusion
L’épanouissement des collaborateurs repose étroitement sur la capacité de l’entreprise à :
- Définir une stratégie qui ne méconnait pas les évolutions de son environnement
- La partager avec ses salariés pour les impliquer dans sa préservation et dans sa compétitivité
- Améliorer les conditions de travail de tous ceux qui réalisent, conçoivent, réalisent, organisent dans le cadre de leurs missions.
Tout projet de modernisation, toute mutation doit être préparée par un accompagnement au changement.
C’est pourquoi il est indispensable que les salariés soient impliqués à tous les niveaux de la hiérarchie, dans les processus de changement et de mutation de leur entreprise. Que chacun se sente concerné. Que chacun « épouse et accepte » le cadre de référence de l’autre.
Un changement bien préparé augmente les chances de réussite de le voir aboutir.
Un changement réussi, c’est la réussite de tous les collaborateurs.
La réussite des collaborateurs devient un facteur de santé au travail et un sentiment d’appartenance et d’utilité sociale.
C’est en 2006 que j’effectue ma première mission sur le sujet.
Une journée de sensibilisation au cours de laquelle, face à des Managers d’une grande entreprise française nous allons réfléchir à :
-->Comment adapter les textes officiels à leur pratique managériale au quotidien ?
Quelle ne fut pas leur surprise lorsqu’ils réalisent que, si les textes en vigueur étaient appliqués à la lettre, ils se seraient retrouvés face à un juge !
Ainsi, ils prenaient toute la mesure de leur responsabilité et des risques qu’ils prenaient… par méconnaissance, par ignorance… ?
Alors comment « traiter » la Méconnaissance face à : Nul n’est censé ignorer la loi ?
Autrement dit, comment aider mon client à prendre conscience que son style de management et sa communication vis-à-vis de son collaborateur/trice sont apparentés à des dérives managériales qui, si elles se poursuivent sur un certain temps, peuvent être reconnues comme harcèlement moral ?
C’est justement en m’appuyant sur les textes et leurs conséquences en cas de non respect de ceux-ci que je parviens à faire avancer mon client vers la prise de conscience de ses actes.
Dans cette formation, je vous montre le type d’exercices que j’utilise à ces fins.
Voici un exemple concret
Un collaborateur porte plainte pour harcèlement moral par son manager.
Pour éviter des ennuis avec la justice, l’entreprise entame une procédure de licenciement touchant ce manager. Elle pense qu’avec cette sanction, elle s’épargne d’autres problèmes et protège son collaborateur.
Elle reconnait qu’il y a un problème.
Que le problème est suffisamment important pour entamer une procédure de licenciement
Il y a donc des solutions.
Méconnaissance ! Elle n’envisage pas de possibilité de changement chez ce manager.
A cet instant, l’entreprise s’agite et méconnait son degré de responsabilité.
En effet, si le juge reconnait qu’il y a eu harcèlement, le manager risque bien d’être condamné… l’entreprise également car le licenciement du manager n’exclut pas la responsabilité de l’entreprise même si le collaborateur indélicat ne fait plus partie de l’entreprise au moment du jugement. Souvent l’entreprise ne dispose pas de ces informations au moment où elle traverse cette turbulence.
Notre mission est donc, sans être des spécialistes juridiques, de mettre l’accent sur tous ces aspects pour protéger les collaborateurs de tous niveaux et par là même l’entreprise et sa Direction.
Aujourd’hui, une partie de mon activité de consultante est consacrée à des interventions sur le sujet sous forme d’ateliers, de conférence, de formation :
- Sensibilisation à la Prévention des RPS
- Gestion du stress au travail
- Gestion des tensions au travail
- Préserver son capital santé en milieu professionnel
- Concilier vie personnelle et vie professionnelle
…
Pour prévenir les risques psychosociaux, l’entreprise fait appel à des cabinets de consultants qui se sont spécialisés dans la formation et l’accompagnement des managers pour leur permettre d’anticiper les « facteurs de risques » et mettre en place les « facteurs de protection » à l’aide d’indicateurs que nous leur soumettons et qui font l’objet d’ajustements pour mieux répondre à leurs besoins, leur structure, leur organisation.
Cette question est encore aujourd’hui très délicate.
En effet, l’entreprise est confrontée à de multiples mutations que certains n’hésitent pas à qualifier de permanentes. Ce qui va générer beaucoup de comportements passifs chez les salariés.
Sur quoi portent les mutations ?
Les mutations auxquelles sont confrontées les entreprises sont de divers ordres :
- L’évolution des besoins des clients : qualité, innovation…
- Les évolutions règlementaires : exigences des processus industriels
- Les évolutions technologiques : courses à la rentabilité
- Les évolutions démographiques :
o vieillissement de la population active conduisant à des départs massifs à la retraite de salariés détenteurs de compétences clés
o allongement de la vie active
- Les évolutions organisationnelles : recherche de la performance à un très haut niveau pour se maintenir sur le marché : Augmentation de la Qualité et diminution des Coûts et des Délais
- Les évolutions sociales : les générations Y et Z
- L’inter culturalité
- Le rapport au temps
- …
Quelles en sont aujourd’hui les conséquences ?
Toutes ces mutations confrontent l’entreprise à des actions ininterrompues touchant :
- L’organisation,
- Le contenu du travail
- L’écart entre le travail prescrit et le travail réel
- Les compétences attendues des salariés
- Les relations manager/subordonné
- …
Paradoxalement, une entreprise saine et viable est une entreprise qui se remet en question, ne méconnait pas les besoins et attentes de ses clients, s’adapte à son environnement, anticipe les départs en retraite pour effectuer au mieux le transfert de compétences, prend soin de tout son personnel….
Dans le cas contraire, elle se met en danger et peut très vite disparaitre.
Méconnaitre ou reconnaitre la souffrance au travail ?
Certaines grandes entreprises comme des moyennes, disent mettre en place une démarche de prévention des Risques Psychosociaux et qui, pour se dédouaner et appliquer la Loi et dire : « on a fait quelque chose » et ne plus se sentir responsables, utilisent la formation des collaborateurs comme moyen stratégique de contournement et ainsi méconnaitre ou fuir leurs responsabilités.
Il n’y a pas de véritable prise en compte de la souffrance des collaborateurs qui vont s’entendre dire « vous avez suivi une formation à la gestion du stress, donc vous êtes maintenant moins stressé ! ».
Ah ! Si ça pouvait être aussi simple à mettre en œuvre ! Si ça pouvait être aussi rapide à mettre en application. Si la formation était la seule solution !
Il est vrai que si je m’appuie sur ce que le Docteur Hans SELYE[1] dit : « Ce qui est important ce n’est pas ce qui nous arrive, mais la manière dont on le prend », alors oui chacun de nous dispose de moyens pour gérer toute situation stressante.
Ce qui me préoccupe aujourd’hui concerne les décisions stratégiques que prennent les entreprises et sur lesquelles les collaborateurs n’ont pas de prise. Autrement dit, ils ne sont pas acteurs mais spectateurs de prises de position qui peuvent avoir des conséquences sur l’organisation de leur travail, voire sur leur poste et l’existence même de leur fonction au sein de l’entreprise.
C’est là que je mesure la limite de la définition du stress de Hans SELYE.
Les mutations, les changements sont et resteront pour certains des challenges à relever, pour d’autres de véritables drames qui peuvent les mener au suicide comme nous avons pu le voir dans une grande entreprise telle qu’Orange.
Accompagner l’entreprise dans son projet de changement
Lorsqu’ils font appel à nous, les premiers échanges que nous avons avec le DHR ou le Responsable de Formation nous amène à faire un constat : le flou qui règne parfois sur la stratégie et les valeurs de l'entreprise, et qui contribue à désolidariser cet ensemble.
Bien entendu, là encore il n’y a pas de volonté à « mal faire, ou de faire mal ». Les éléments identifiés par les différents acteurs : Direction, IRP, personnel, ne sont pas rassemblés pour donner une image globale et claire de situations de souffrance.
Chacun pensant détenir « une information sans grande importance, sans conséquence » !
Plus spécifiquement, pour ce qui concerne la question psychosociale, il y a un, dans certaines entreprises, un manque de prise de conscience sur ce sujet malgré les réalités auxquelles elles sont confrontées, ce qui renforce le déni, par peur plus que par manque de considération vis-à-vis des collaborateurs :
- La peur de « voir » la souffrance de l’autre
- La peur de se sentir envahi par les émotions de l’autre et de ne pas savoir l’accueillir, la gérer
- La crainte de se sentir obligé d’en parler au risque que cela soit associé à de la délation ou à l’inverse d’être accusé de « non assistance à personne en danger »
- La peur d’entendre l’autre et de devoir mener une action, telle que « le droit de retrait » génère de l’agitation chez certains.
- La peur liée au manque de connaissance du sujet et de ses propres aptitudes à résoudre le problème
Sont autant de facteurs qui s’ajoutent à la peur d’entreprendre des actions correctives ou réparatrices et génèrent stress, fatigue et tensions au travail.
Quelles sont aujourd’hui les nouvelles perspectives ?
Nous pouvons espérer aujourd’hui qu’avec les nouvelles dispositions[2] concernant « la formation professionnelle tout au long de la vie », les entreprises qui n’ont pas encore :
- pris la mesure de ces dispositions
- mis en place les actions de préventions primaires et/ou secondaires
- pris la mesure des dégâts qui pourraient être occasionnés par une intervention de niveau tertiaire
vont mieux prendre en considération le fait qu’elles jouent un rôle essentiel pour la sécurité et la santé de leurs salariés.
En levant cette méconnaissance elle contribue à la santé même de l’entreprise.
Il nous revient donc à nous consultants, formateurs, de rassurer, d’expliquer et d’accompagner avec empathie et neutralité.
La préservation de l’image de l’entreprise
Il est vrai qu’une entreprise qui a été malmenée par des situations de RPS voit son image écornée :
- A l’intérieur par une démobilisation des salariés dont la productivité va s’en ressentir par des comportements passifs
- A l’extérieur par la perte de contrats et/ou de clients pouvant entraîner plus encore de difficultés au sein même de l’entreprise.
Attentives à préserver cette indispensable image à leur survie, certaines entreprises nous sollicitent :
1. Soit pour répondre davantage à une obligation légale qu’à une volonté de prendre soin des collaborateurs, non pas qu’elles ne le veuillent pas, mais plutôt parce qu’elles sont persuadées que « les collaborateurs sont heureux de travailler chez nous ! ».
Elles méconnaissent/ignorent qu’il y a des collaborateurs qui souffrent.
Exemple : A l’ occasion d’une formation à la gestion du stress, une participante va manifester un très haut niveau d’agitation dès le démarrage de ladite formation au point que j’ai dû faire intervenir la DRH pour qu’elle soit prise en charge. Elle risquait de compromettre le bon déroulement de la formation et de transmettre cette agitation aux autres membres du groupe.
A des problèmes personnels s’est ajouté un problème professionnel : l’entreprise a été rachetée depuis 3 semaines ! Cette information circule parmi le personnel mais aucune information officielle ne vient confirmer ou démentir.
Le démarrage de la formation devient l’endroit où se produit le coup de théâtre (selon la formule du Jeu de Berne).
2. Soit pour « faire passer un message fort en direction de personnes concernées par des situations de RPS
Exemple : Une Grande Ecole me sollicite pour mettre en place une journée de sensibilisation à la Prévention des RPS auprès de son CODIR.
Consigne de la DRH : « Je veux que vous leur fassiez peur. Un membre de notre Codir est accusé de harcèlement moral mais elle considère qu’il n’y a pas de harcèlement et nie tout en bloc. Cette affaire est au tribunal ».
Que peut-on dire dans ces deux situations ?
Dans les deux cas, nous sommes face à des comportements passifs, auxquels s’ajoutent :
Cas 1
Méconnaissance du problème. Ce qui nécessiterait de faire un diagnostic de la situation, mais ce n’est pas mon contrat avec ce client.
Cas 2
La DRH reconnait :
- Qu’il y a un problème
- Qu’il est important
- Il n’y a rien à faire en interne
En me demandant de « leur faire peur » elle m’invite dans une relation symbiotique malsaine et de prise en charge d’un niveau de problème interne à l’entreprise qui se sent démunie.
Ce n’est pas mon rôle, ce n’est pas un contrat acceptable.
Il relève plutôt du contrat psychologique et pourrait m’entrainer dans le Triangle Dramatique de Stephen Karpman.
Pourquoi aujourd’hui l’entreprise met-elle les managers au cœur du dispositif des RPS ?
L’ANACT[3] qui effectue régulièrement des enquêtes, souligne trois raisons qui mettent les managers au cœur des dispositifs de prévention des risques psychosociaux :
Une cible privilégiée du stress : les managers gèrent des injonctions contradictoires sans pour autant avoir les marges de manœuvres nécessaires pour y faire face.
Des détecteurs des signaux : compte tenu de leur position et de leur connaissance du travail, ils sont plus à même de détecter les premiers signaux de détresse des collaborateurs ainsi que d’autres facteurs de RPS comme la variation de la charge de travail, l’affectation de moyens limités, un raccourcissement des délais…
Des régulateurs de tensions : par ses actions de soutien, de reconnaissance et de régulation de l’activité au quotidien, il est l’acteur central pour gérer les tensions liées au travail et favoriser les facteurs de protection.
Quelle est la perception du rôle du manager dans le cadre de référence du collaborateur ?
Les salariés attendent donc beaucoup de leur manager :
- Une bonne écoute
- De la disponibilité
- De la reconnaissance
- Une bonne aptitude à planifier et organiser l’équipe et le travail
- Un soutien inconditionnel
Ce manager est lui-même un collaborateur vis-à-vis de son propre manager.
Donc s’il vient à manquer de disponibilité, de reconnaissance ou d’objectivité dans une situation donnée, ses compétences managériales sont remises en cause et vont bousculer le cadre de référence du collaborateur.
Alors, quelle est la place du Cadre de Référence dans ce type de situations ?
Selon les SCHIFF, le cadre de référence se définit comme :
- Un Mécanisme par lequel une personne filtre et oriente sa vision de la réalité de façon à fuir sa responsabilité, à éviter d’avoir à agir, à rester dans des relations problématiques conflictuelles et dépendantes POUR MAINTENIR SON CADRE DE REFERENCE.
- Le cadre de référence d’un individu est la structure des réponses (connexions nerveuses) associées (conditionnées), qui intègre les différents états du moi en réponse à des stimuli spécifiques.
- Il fournit à l’individu un ensemble cohérent de perceptions, de concepts, d’émotions et d’actions, qui lui sert à définir lui-même, les autres et le monde.
Pour réussir son projet, l’entreprise met les managers de tous niveaux au cœur du dispositif de la prévention des RPS et crée des indicateurs de dépistage collectifs qui seront validés en amont :
- Indicateurs de dépistage liés au fonctionnement de l’entreprise
- Indicateurs de dépistage liés à la santé et à la sécurité
- Indicateurs internes : climat social
Ces indicateurs constitueront un cadre de référence commun à tous les collaborateurs et permettront d’asseoir toutes les autres actions que l’entreprise devra mettre en œuvre pour assurer sa compétitivité.
En conclusion
L’épanouissement des collaborateurs repose étroitement sur la capacité de l’entreprise à :
- Définir une stratégie qui ne méconnait pas les évolutions de son environnement
- La partager avec ses salariés pour les impliquer dans sa préservation et dans sa compétitivité
- Améliorer les conditions de travail de tous ceux qui réalisent, conçoivent, réalisent, organisent dans le cadre de leurs missions.
Tout projet de modernisation, toute mutation doit être préparée par un accompagnement au changement.
C’est pourquoi il est indispensable que les salariés soient impliqués à tous les niveaux de la hiérarchie, dans les processus de changement et de mutation de leur entreprise. Que chacun se sente concerné. Que chacun « épouse et accepte » le cadre de référence de l’autre.
Un changement bien préparé augmente les chances de réussite de le voir aboutir.
Un changement réussi, c’est la réussite de tous les collaborateurs.
La réussite des collaborateurs devient un facteur de santé au travail et un sentiment d’appartenance et d’utilité sociale.
Pour aller plus loin : formation "Prévenir et Agir sur les R.P.S. avec les Outils de l'Analyse Transactionnelle
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Bibliographie
SCHIFF, J. & A. 1977 : Cadre de référence, A.A.T., 3
MELLOR, K. & SCHIFF E. 1977 : Redéfinitions, A.A.T. 3
COMBALBERT, N., 2010 : La souffrance au travail – Comment agir sur les risques psychosociaux, Armand Colin, février 2010
TRIMARCHE, O., 2010 : Au-delà de la souffrance au travail – Clés pour un autre management, Odile Jacob, avril 2010
ANACT, Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail www.anact.fr
[1] SELYE Hans 1907-1982 – Médecin endocrinologue
Pionnier de la recherche sur le stress. A acquis une réputation internationale en développant le concept du stress biologique et ses applications en médecine. Il fait également le lien entre cerveau, émotions et corps.
Il va également développer le concept du « Syndrome Général d’Adaptation » et des trois stades de son évolution.
[2]Loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale
[3] ANACT : Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail